Satomi Ichikawa

J'ai découvert Satomi Ichikawa, dans une bibliothèque où à la recherche d'un livre pour enfant je suis tombé sur « Dalla Dalla ».Il s'agit d'une histoire se déroulant à Zanzibar écrite et dessinée par cette japonaise. Vous avouerez que c'est quand même curieux une histoire africaine racontée par une japonaise ! Pourtant, en plus du dessin très agréable, ce qui frappe à la lecture de cette histoire c'est l'authenticité qu'elle dégage...

J'ai donc profité du Salon du Livre Jeunesse, à Montreuil en novembre dernier, pour aller à sa rencontre et j'ai découvert une vraie globe-trotteuse qui s'inspire de ses voyages pour créer des livres pour enfants.

Il faut savoir que Satomi Ichikawa a grandi dans un petit village de la région de Gifu où il n'y avait pas de train, ni de bus. Après avoir passé des heures à rêver dans son jardin, lorsque l'heure de l'indépendance a sonné, elle a décidé de partir à la découverte du monde !

Elle pose d'abord ses valises en Italie, pays magnifique mais ne lui correspondant pas tout à fait. Au bout de quelques mois, elle décide donc de partir pour Paris et le coup de foudre est immédiat. Tout lui plait, l'architecture, le coté un peu vieillot et toutes les possibilités qu'offre la ville. Elle en fera son port d'attache et y habite encore aujourd'hui.

C'est d'ailleurs en se promenant à Paris qu'elle découvre un livre de Maurice Boutet de Monvel qui l'enthousiasme. Alors qu'elle n'a jamais étudié les Beaux-Arts, elle décide de se mettre à dessiner.

Bien qu'habitant en France, elle publie son premier livre (A child's book of seasons) il y a 35 ans en Angleterre. Elle avait remarqué qu'à l'époque, la culture du livre pour enfant était très développée Outre-Manche. Elle a donc décidé d'aller présenter ses dessins à des éditeurs anglais (sans RDV !). Et la première porte qu'elle a poussé a été la bonne ! Ce n'est qu'un peu plus tard qu'elle trouvera un éditeur en France. Elle est à présent traduite dans 8 langues !

Entre-temps, sa soif de découverte l'emmène partout en Europe (Italie, Angleterre, Espagne, Suède) mais ce n'est jamais assez. Lorsque se présente l'opportunité d'aller en Tanzanie et au Kenya avec des amis, Satomi se précipite sur l'occasion de découvrir l'Afrique. Et ce qu'elle va découvrir va l'émerveiller. La différence de culture, de mode de vie, la simplicité des gens et leur générosité la touche beaucoup.

A l'issue de ce voyage Satomi n'aura qu'un seul regret, celui d'être parti en voyage organisé et de ne pas avoir pu s'attarder là où elle le souhaitait. Elle décida donc d'y retourner toute seule quelques mois plus tard ! Suivra ensuite une liste impressionnante de voyages en Afrique : Algérie, Maroc, Libye, Mali, Bénin, Niger.

La plupart de ces voyages africains ont donné lieu à des albums : « Baobonbon », « Le magasin de mon père », « Ma chère Karam Karam », « Dalla Dalla », « Les voitures de Jibril ».

Quand Satomi part en voyage c'est surtout sans appareil photo et elle se laisser guider au grès de ses envies. Elle peut ainsi passer plusieurs jours dans une même ville à dessiner tout se qui se présente à elle. Satomi n'aime pas prendre des photos, elle trouve cela agressif et préfère dessiner. C'est plus convivial ! Le temps passé à observer figent les choses dans sa mémoire et lui permet ainsi de se rappeler, la lumière, les odeurs, les bruits;etc...

De plus, partir seule facilite l'intégration et les contacts avec la population locale. Rester plusieurs jours dans un même endroits lui permet également de gagner la confiance des gens et de voir comment ils vivent vraiment (leur rythme de vie, leurs problèmes, leurs contraintes,etc...). Les contacts se font d'autant plus facilement car Satomi étudie la langue du pays dans lequel elle se rend (elle peut notamment parler l'arabe et le swahili !).

De retour à Paris, lorsque lui vient l'idée, elle décide d'écrire une histoire. Une fois l'histoire trouvée, elle ressort ses carnets de voyages pour l'illustrer. Tout ce que l'on peut voir dans les albums est réel : les véhicules, les animaux, les costumes, les objets viennent des croquis qu'elle a fait sur place. C'est ce qui donne un caractère authentique à ses albums.

Les histoires trouvent souvent leur origine dans des personnages ou des conversations qu'elle a pu avoir durant ses voyages. Comme par exemple l'album « De la glace à la pomme de terre ». Il lui a été inspiré par un petit péruvien vivant à plus de 4 000m d'altitude (et plusieurs jours de marche de la ville) et qui rêve de manger une glace !

Les histoires s'articulent souvent autours des animaux car Satomi les aime beaucoup. Malheureusement comme elle est souvent absente, il lui est impossible d'en avoir un à Paris.

Mais elle en rencontre beaucoup durant ses voyages. Comme Renata, petite Amazone domestique de Puerto Rico, qui après avoir passé des journées entières à jouer et chanter à coté d'elle lui a inspiré son dernier album « Patricio et Renata ».

Satomi a fait beaucoup albums sur l'Afrique et l'Amérique du sud. Mais très peu sur le Japon (1 seul : « la fête de la tomate ».). Quand on lui demande pourquoi elle ne dessine pas beaucoup à propos du Japon, elle répond avec malice qu'elle à tout le temps de le faire lorsqu'elle ne pourra plus voyager. Donc pour l'instant elle préfère visiter le monde !

Des expositions sont régulièrement consacrées aux travaux de Satomi Ichikawa au Japon ces dernières années. Elle y retourne donc régulièrement, ce qui lui a donné l'occasion de rentrer dans son village natal. C'est en redécouvrant le jardin familial et le goût des fruits qu'y cultive sa mère que l'idée de l'album «  la fête à la tomate » lui est venue.

Cet album est un véritable hommage à la terre et aux paysans du Japon. En effet, Satomi confie qu'elle voulait immortaliser dans cet album la tenue de paysanne que porte sa mère pour travailler et dont l'usage tend à se perdre aujourd'hui.

Ses récents voyages l'ont conduit Moyen-Orient et on imagine que son prochain album devrait s'y dérouler. On guette cela avec attention et nous ne manquerons pas de vous tenir informés de son actualité !

D'ici là, je vous invite à découvrir la richesse des albums de Satomi Ichikawa. Que vous aimiez l'Afrique, l'Amérique du Sud ou le Japon, il y a forcément un album qui vous plaira. Et même si ce sont des albums pour enfants, les dessins sont de véritables carnets de voyages pour les grands !

Je remercie encore Dorian Sibilet et les éditions L'Ecole des Loisirs d'avoir permis cette rencontre possible